La préparation de la retraite a beau être l’un des principaux motifs d’épargne des Français, les produits d’épargne-retraite ne rencontrent qu’une modeste adhésion. Ils totalisent près de 200 milliards d’euros d’encours, soit moins de 10 % des montants déposés sur l’assurance-vie et le Livret A réunis (plus de 2 000 milliards d’euros).
Lors d’une conférence organisée par l’AFER, le ministre de l’Économie Bruno Le Maire a esquissé les grandes lignes du volet Épargne de la loi PACTE (Plan d’Action pour la Croissance et la Transformation des Entreprises).
Partant du principe qu’il existe aujourd’hui « trop de dispositifs […] trop compliqués, trop contraignants, pas assez incitatifs du point du vue fiscal », le ministre propose une série d’aménagements pour faire de l’épargne-retraite « un réflexe pour les Français ».
Passons en revue ces propositions !
1. La portabilité des contrats : votre épargne-retraite vous suivra partout
« Lorsque vous changerez d’entreprise ou de métier, votre compte d’épargne-retraite vous accompagnera ».
De nombreux épargnants disposent de reliquats d’épargne-retraite accumulés au fil des années : passages dans des entreprises qu’ils ont depuis quittées, produits Madelin dédiés aux indépendants ou encore cotisations volontaires sur un PERP.
Pour remplacer ce système peu lisible, les transferts d’une enveloppe à l’autre (un PERCO vers un PERP par exemple) deviendront possibles. La portabilité concerne les 4 dispositifs actuels (PERCO, PERP, Madelin et Art. 83). Chaque épargnant pourra ainsi regrouper son épargne-retraite sur le produit de son choix, indépendamment des entreprises dans lesquelles il a travaillé.
Pour permettre des transferts sans accroc, des règles communes à tous les produits seront établies. En revanche, la fusion complète n’est pas au programme.
2. À la retraite, une sortie en capital plutôt qu’en rente
Actuellement, hormis quelques exceptions, l’épargne accumulée est reversée à la retraite sous forme de rente. À l’avenir, l’épargnant pourra également récupérer la totalité du capital, à la manière d’un rachat total sur un contrat d’assurance-vie.
Ce point fait encore débat mais le projet prévoit de créer trois enveloppes :
- • une enveloppe alimentée par les versements des entreprises au titre des contrats collectifs,
- • une enveloppe alimentée par l’intéressement et la participation,
- • une enveloppe alimentée par les versements volontaires de l’épargnant.
Alors que la première enveloppe sera obligatoirement liquidée sous forme de rente, les deux dernières offriront une liberté de choix : rente ou capital. La rente sera toutefois fiscalement favorisée par un abattement fiscal de 10 %.
3. Un déblocage anticipé pour achat de résidence principal
Aujourd’hui, les produits d’épargne-retraite sont des produits « tunnel » : la sortie n’est possible qu’au moment de la retraite. Seul le PERCO permet un déblocage anticipé pour achat de résidence principale.
Le projet de loi prévoit d’aligner les conditions de sortie anticipée sur celles du PERCO, une flexibilité bienvenue qui pourrait lever l’un des principaux freins à la souscription chez les épargnants les plus éloignés de la retraite.
4. Les versements déductibles des revenus quel que soit le produit
Le gouvernement prévoit d’harmoniser l’effet défiscalisant des versements volontaires.
Actuellement, les versements sur le PERP, le Madelin et l’Article 83 sont déductibles des revenus imposables, tandis que ceux réalisés sur le PERCO n’offrent aucun avantage fiscal à la souscription.
Dans le nouveau dispositif, tous les versements d’épargne-retraite seraient déductibles des revenus imposables : 1 000 euros versés sur un produit d’épargne-retraite seront 1 000 euros de revenu imposable en moins.
En contrepartie, l’imposition sera reportée à la sortie, période de la vie où la tranche d’imposition est en général plus faible.
5. Une épargne plus rentable grâce à l’investissement en actions
Cette proposition rejoint l’objectif premier de la loi PACTE : améliorer la compétitivité des PME.
Les employeurs seront incités, grâce à un allègement du forfait social, à proposer des plans d’épargne-retraite investis dans des PME-ETI, offrant aux épargnants des perspectives de rendement plus élevées en cohérence avec l’horizon long de l’épargne-retraite.
Enfin, pour aider les investisseurs à adapter leur épargne à leur horizon personnel, le gouvernement encouragera les formules de gestion pilotée : l’épargne sera principalement investie en actions lorsque le salarié est en début de carrière, puis progressivement sécurisée sur des produits obligataires à l’approche de la retraite.
6. Sur option, la rente versée au conjoint survivant après le décès
Reste le volet successoral. Par défaut, un produit d’épargne-retraite verse une rente jusqu’au décès du bénéficiaire.
L’option de réversion, qui permet de poursuivre le versement de la rente au conjoint survivant, sera généralisée à tous les contrats. Il s’agit d’une option payante dont le coût se matérialise par une rente plus faible.
L’avis de LinXea
La transférabilité rendra un excellent service aux épargnants. Les épargnants pourront mieux comparer leurs produits et les regrouper chez l’intermédiaire qui offre les meilleures prestations au moindre coût.
Autre bonne nouvelle, la sortie en capital. Elle permettra aux épargnants de choisir les placements les plus adaptés à leur situation au moment de la retraite (des SCPI par exemple) plutôt qu’une rente.
Mais l’épargne-retraite réinventée aura-t-elle assez d’arguments face à l’assurance-vie ? Cette dernière répond déjà bien aux objectifs de la retraite : elle permet de capitaliser sur un large choix de supports avec une fiscalité avantageuse, il est possible d’en sortir à tout moment, et ses avantages successoraux sont sans égal dans le paysage de l’épargne.
L’objectif du gouvernement (augmenter l’encours de l’épargne-retraite de 100 milliards d’euros d’ici 2022) nous semble à cet égard particulièrement ambitieux…
Le projet de loi devrait être discuté au Parlement d’ici l’été.