Censée protéger les emprunteurs, la réglementation des taux de l’usure se retourne contre les consommateurs en restreignant les accès aux prêts immobiliers. Les candidats emprunteurs subissent une sorte d’effet guillotine qui leur coupe la possibilité d’emprunter.
En France, les prêts immobiliers sont encadrés par la réglementation de l’usure
Tous les taux des prêts immobiliers sont en hausse car les ressources des banques sont elles-mêmes en hausse. En effet, pour vous accorder des prêts immobiliers les banques doivent se financer. Elles le font généralement en souscrivant des emprunts d’État de type OAT. Supposons que les banques se financent à 1,60% elles ne peuvent donc pas vous prêter à moins de 1,95%. Mais c’est oublier les lourdes contraintes qui pèsent sur la réglementation des prêts et en particulier le taux de l’usure.
Instituée dans le but de protéger les consommateurs cette réglementation peut leur interdire l’accès aux prêts
L’établissement de crédit n’est pas totalement libre de fixer les taux des prêts bancaires. Ceux-ci varient selon le type de contrat de crédit auquel vous souscrivez.
Le seuil de l’usure applicable à compter du 1er juillet 2022 pour les trois mois du troisième trimestre 2022 (juillet, août et septembre 2022) passe à 2,57% pour les crédits immobiliers d’une durée de 20 ans et plus, tandis que pour les prêts de moins de vingt ans, ainsi que pour les crédits immobiliers d’une durée inférieure à 10 ans, il passe à 2,60% selon les chiffres publiés au Journal Officiel (Avis du 27 juin 2022 relatif à l’application des articles L. 314-6 du code de la consommation et L. 313-5-1 du code monétaire et financier concernant l’usure publié au Journal Officiel du 30 juin 2022).
Ce taux de 2,57 % et celui de 2,60% est un TAEG, c’est-à-dire un taux annuel effectif global.
Comme l’indique la Banque de France « Le TAEG est le taux d’intérêt « tout compris » d’un crédit. Il comprend notamment :
- Le taux d’intérêt nominal (= le taux utilisé pour calculer les intérêts de votre prêt),
- Les frais de dossier,
- Les frais payés ou dus à des intermédiaires intervenus de quelque manière que ce soit dans l’octroi du prêt (exemple : courtier),
- Les coûts d’assurance et de garanties obligatoires.
Si, au moment où le prêt vous est accordé, le TAEG du crédit dépasse le taux de l’usure, le prêt est dit usuraire. Il est interdit d’accorder un prêt à un taux usuraire. »
Exemple : Un client trouve un prêt d’une durée de 20 ans au taux nominal de 2,10%, il pense que ce prêt va lui être accordé. Erreur : ce client oublie qu’au taux de base il faut ajouter les frais (frais de dossier, de garantie et les frais d’assurance emprunteur décès et invalidité). Résultat son prêt immobilier lui est accordé au taux annuel effectif global de 2,85%, ce qui est supérieur au taux de l’usure. Le prêt doit donc lui être refusé car il dépasse le seuil de l’usure fixé pour un prêt immobilier à taux fixe de 20 ans à 2,57% maxi.
Et si mon banquier ne respecte pas le taux de l’usure ?
Mais direz-vous une banque pourrait-elle en faisant signer un accord à son client lui proposer un taux supérieur au taux de l’usure ?
Non ce n’est pas possible. Cette banque serait poursuivie devant le tribunal correctionnel. L’usure est un délit passible d’un emprisonnement de deux ans et/ou d’une peine d’amende de 300 000 € (article L341-50 du Code de la consommation).
L’interdiction de l’usure protège-t-elle les consommateurs ou simplement les empêche-t-elle d’accéder au crédit ?
Tous les pays n’ont pas une législation à propos du taux de l’usure.
En Grande-Bretagne Il n’existe pas de taux de l’usure. Il appartient aux tribunaux d’apprécier la « normalité » du taux d’intérêt et de sanctionner les taux excessifs. Dans les pays scandinaves il n’existe pas de définition du taux de l’usure, c’est aux banques centrales nationales de vérifier les pratiques bancaires.
Cette réglementation française est loin d’être parfaite.
C’est ainsi que dans des travaux parlementaires du Sénat concernant l’accès des ménages au crédit en France on lisait dans un rapport d’information déposé le 16 mars 2006 : « Votre rapporteur estime qu’il existe des arguments raisonnables pour modifier la réglementation de l’usure sur la base d’une modulation des plafonds de taux en fonction du montant du capital emprunté et, peut-être, des modalités de financement des établissements prêteurs. Par ailleurs, il semble judicieux de tenir compte de l’effet des hausses du coût du financement dans les périodes où de tels phénomènes interviennent, afin d’éviter qu’elles ne se traduisent par une raréfaction artificielle du crédit. »
À force de trop vouloir protéger on aboutit à un résultat inverse, on interdit à certains d’emprunter !