Depuis des décennies, le leitmotiv suivant revient à l’infini : l’épargne des Français n’est pas bien investie ! Ces dernières années les gouvernements ont multiplié les tentatives d’orientation de l’épargne des ménages vers les PME. Mais les ménages souhaitent-ils réellement investir leur épargne dans les entreprises, quelle que soit leur taille ?
De multiples essais pour orienter l’épargne vers les entreprises …
Les gouvernements successifs ont toujours rêvé d’orienter l’épargne des particuliers vers les entreprises. Dès 1986 on a connu l’époque des premières privatisations massives (Saint Gobain, Paribas, TF1, Suez …) qui ont été un succès, mais qui n’ont pas, pour autant, créé une génération d’investisseurs financiers. Lors de chaque privatisation, le même scénario s’est déroulé : les particuliers qui ont acheté des actions les ont revendues avec profit dans les semaines qui ont suivi chaque privatisation.
La création du Plan d’épargne en actions (PEA) dès 1992 a également eu pour but de diriger l’épargne vers la Bourse. Aujourd’hui, l’idée est plus de diriger l’épargne des ménages vers les PME que de désendetter l’État grâce à la vente de grosses entreprises.
Dernière initiative en date, le décret n°2020-1014 du 7 août 2020 relatif à la réduction d’impôt pour souscription en numéraire au capital des PME, qui institue, de nouveau, le taux de 25 % pour les investissements effectués entre le 10 août et le 31 décembre 2020. Ce décret n’est pas une première puisque des dispositifs similaires ont existé à plusieurs reprises (notamment, la réduction d’impôt sur le revenu de 18 % des versements effectués chaque année, retenus dans la limite de 50 000 € pour une personne célibataire, veuve ou divorcée ou 100 000 € pour les personnes mariées ou pacsées soumises à une imposition commune à condition de conserver les titres jusqu’au 31 décembre de la 5ème année suivant celle de la souscription).
Plus d’épargne dans la tranche d’âge de 50 à 59 ans
Le dernier INSEE Première n°1815 paru le 17 septembre 2020 nous confirme que le taux d’épargne moyen en France s’élève à 15,9%, et précise que « Le taux d’épargne croît régulièrement avec l’âge, de moins de 9 % chez les moins de 40 ans à 17,8 % chez les 50-59 ans ».
L’épargne d’un ménage « est, en proportion de son revenu, d’autant plus importante qu’il est aisé : en 2017, le taux d’épargne passe de 2,7 % du revenu disponible brut pour les ménages du premier quintile (revenus annuels moyens de 6 962 €) à 28,4 % chez ceux du dernier quintile (revenus annuels moyens de 60 808 €)».
Une forte hausse de l’épargne privée
Sur la période 2009 / 2018, l’épargne a évolué en sens inverse de l’investissement au sein de l’Union Européenne (UE).
Le Bulletin de la Banque de France n° 231/3 de septembre-octobre 2020 constate que « L’épargne privée de l’UE, principale source de financement au niveau domestique, a progressé de 1,7 point de PIB entre 2007 et 2019. Cependant, dans le même temps, la proportion des actifs financiers des ménages de l’UE détenus en actions, titres de dettes et parts de fonds d’investissement a fortement reculé (– 8 points dans le portefeuille des ménages) tandis que les parts des actifs en numéraires et assurances-vie ont fortement augmenté (+ 8 points).
Ainsi, les ménages européens privilégient les actifs les moins risqués (plus des deux tiers du portefeuille). À l’inverse, les ménages américains optent pour des actifs plus risqués : près de 50 % de leur portefeuille est composé d’actions et de parts de fonds d’investissement, soit 20 points de plus qu’en Europe…/… ».
Comment diriger l’épargne vers les entreprises ?
Toujours, en page 8, l’étude de la Banque de France indique que « De plus, les ménages de l’UE détiennent deux fois moins d’actifs qu’aux États-Unis, mesurés en parts de PIB (216%, contre 446% du PIB en 2019). Parmi ceux-ci, la part des actions et celle des fonds d’investissement est trois fois plus faible qu’aux États-Unis (respectivement 63 % et 217 % du PIB). Pourtant, les marchés financiers représentent une opportunité de placement pour l’épargne des ménages, certes plus risquée que les dépôts bancaires, mais mieux rémunérée ».
En conclusion, on peut penser que l’épargne est peut être mal utilisée, mais les circuits d’investissements et les opportunités sont-ils suffisants et sont-ils adaptés ?
On ne peut pas accuser l’épargnant de mal investir son épargne. L’épargnant recherche à la fois la sécurité et une bonne liquidité, les investissements proposés dans les entreprises n’offrent pas forcément à l’épargnant ces deux principales caractéristiques.
L’étude de la Banque de France souhaite développer « Plusieurs pistes afin de mieux orienter l’épargne européenne vers les entreprises. Des produits paneuropéens de placement pourraient être développés, sous la forme d’épargne retraite ou d’épargne d’entreprise, tout en veillant à préserver un juste équilibre entre la prise de risque et l’encadrement prudentiel. »
Dans cette attente …