La Cour de cassation vient de consacrer par quatre arrêts récents la supériorité du nantissement du contrat d’assurance-vie sur le privilège général du Trésor Public.
Le fisc va devoir attendre son tour ….
Dans deux arrêts de cassation du même jour, les magistrats ont reconnu que le nantissement du contrat d’assurance-vie prévaut sur le privilège général donné au fisc par l’article 1920 du code général des impôts.
Dans la première affaire, le comptable du service des impôts des entreprises de Paris 16ème, sur le fondement d’un titre exécutoire délivré à l’encontre de M. W. a notifié le 25 août 2016 entre les mains de la société HSBC assurances vie un avis à tiers détenteur pour un montant de 40 165 euros. L’assureur a refusé tout versement, en indiquant, notamment, que l’un des contrats souscrits par M. W. avait fait l’objet d’un nantissement le 24 septembre 2013 pour un montant de 40 050 euros, au profit de la banque HSBC France.
Dans la seconde affaire, le comptable du service des impôts des particuliers de Paris 7e, agissant sur le fondement de titres exécutoires délivrés à l’encontre de M. B., a notifié le 31 août 2016 entre les mains de la société Cardif assurance vie un avis à tiers détenteur portant, notamment, sur un contrat rachetable n°305536 souscrit par le débiteur. L’assureur a fait valoir que le contrat en cause avait fait l’objet d’un nantissement le 2 décembre 2012 au profit de la banque BNP Paribas et il a indiqué qu’il ne pouvait procéder à aucun paiement au titre de ce contrat. (Deux arrêts : Cour de cassation, 2ème chambre civile, 2 juillet 2020, pourvoi n° 19-10308 et Cour de cassation, 2ème chambre civile, 2 juillet 2020, pourvois n°19-11.417et 19-13.636).
Un troisième arrêt de la Cour de cassation en date du 17 septembre 2020 (2ème chambre civile, pourvoi n° 19-10.420) réaffirme la priorité du créancier nanti, cette fois sur le comptable du service des impôts des particuliers de Paris 5ème arrondissement.
Un quatrième arrêt vient corroborer, s’il en était besoin les trois décisions précédentes. Pris 15 jours avant Noël, cet arrêt du 10 décembre 2020 (2ème chambre civile, pourvoi n° 19-19.340) met en jeu le comptable responsable du service des impôts des entreprises de Paris 16ème La Muette qui réclamait à l’assureur un montant de 90 449 euros sur un contrat d’assurance-vie nanti au profit d’une banque à hauteur de 65 000 euros. L’assureur a refusé tout versement en indiquant que le contrat n’était pas dénoué et était nanti.
Les quatre décisions de la Cour de cassation citées ci-dessus sont des arrêts de cassation auxquels les juristes reconnaissent plus de valeur qu’aux arrêts de rejet. En effet, les arrêts de cassation vont à l’encontre de décisions de cours d’appel en les cassant (alors que les arrêts de rejet ne font que confirmer les décisions des cours d’appel). Dans les quatre affaires examinées par la Cour de cassation, les quatre décisions précédentes des cours d’appel ont donc été annulées.
Les magistrats ont donné la même conclusion aux quatre affaires :
Il résulte de l’article 2363 du code civil et l’article L. 132-10 du code des assurances « que le créancier bénéficiaire d’un nantissement de contrat d’assurance vie rachetable, qui peut provoquer le rachat du contrat, dispose d’un droit exclusif au paiement de la valeur de rachat, excluant ainsi tout concours avec les autres créanciers du souscripteur, même privilégiés ».
LINXEA vous informe
Le nantissement confère au créancier nanti un droit exclusif sur la valeur de rachat.
Rappelons que le nantissement est une garantie qui peut être donnée à une banque (notamment lorsqu’un prêt in fine est mis en place) ou volontairement à une personne dont on est débiteur pour garantir – partiellement ou totalement – le montant de la créance de cette personne.
Lorsque le contrat d’assurance-vie est donné en nantissement, l’assuré, même redevable d’impôts ou de taxes envers le Trésor public, ne dispose plus dans son patrimoine des droits sur son contrat, droits qu’il a régulièrement transférés au bénéficiaire du nantissement. Le fisc ne peut alors saisir les sommes qui sont sur le contrat d’assurance-vie.