En marge de la prochaine réforme des retraites (dont la présentation et les débats ne commenceront finalement qu’à partir du 10 janvier 2023) François Bayrou, le Haut-Commissaire au Plan, également président du MoDem, analyse cinq pistes à prendre en compte.
Dans une étude d’une vingtaine de pages appelée “Éclairage / 8 décembre 2022 Retraites : une base objective pour le débat civique” le Haut-Commissariat au Plan passe en revue nos systèmes de retraite et les mesures qui pourraient être prises à l’avenir pour leur garantir une certaine pérennité.
François Bayrou Haut-Commissaire au Plan a publié une étude synthétique relevant certaines caractéristiques actuelles des régimes de retraites et suggérant également plusieurs pistes pour la prochaine réforme des retraites.
Les constats à propos des régimes actuels de retraite
- Certains régimes sont excédentaires, d’autres déficitaires
« Lorsqu’il est affirmé que nos régimes de retraites sont « en excédent », il s’agit seulement et uniquement d’un constat partiel qui ne porte que sur les régimes complémentaires de salariés ou d’indépendants, à l’exclusion des régimes de la fonction publique, des régimes spéciaux et d’exploitants agricoles, dont le large déficit est couvert par des fonds publics. La situation est la même quoique dans une moindre mesure pour une part du régime général. »
- Il manque 30 milliards par an
« On constate qu’il demeure un besoin de financement complémentaire de près de 30 Md€, nécessaire pour garantir l’équilibre de l’ensemble du système. L’apport de ces 30 Md€ est indispensable pour les caisses qui subissent les effets d’une démographie défavorable, celles de la fonction publique de l’État, des collectivités territoriales et des hôpitaux publics, des régimes spéciaux d’entreprises publiques et du régime des exploitants agricoles.»
- Globalement notre protection vieillesse obligatoire est en déficit structurel important
La conclusion de cette étude est la suivante : “Dans l’ensemble, et pris globalement, notre système de retraites risque de se voir de plus en plus fragilisé dans son équilibre financier et, en aggravant continuellement notre dette, de peser de plus en plus sur la capacité économique du pays et sur son indépendance”.
Les pistes proposées
Le Commissariat au Plan a listé cinq pistes pour combler le déficit actuel de certains régimes et tenter d’assurer la pérennité de l’ensemble des régimes de retraites :
1. Ne pas baisser les pensions de retraite
« Toute intervention nouvelle pour diminuer, même à terme, le pouvoir d’achat des pensions aurait plusieurs effets négatifs…/… C’est pourquoi le Commissariat au Plan considère comme une priorité et un facteur commun à toute réforme de défendre le pouvoir d’achat des pensions. »
2. L’allongement de la durée des carrières (envisager 64 ans ?)
“Le système des retraites serait à l’équilibre en 2032 (dans le scénario d’un « équilibre permanent des régimes ») si l’âge moyen de départ était porté à 64,2 ans (source COR). La Direction générale du Trésor a, quant à elle, calculé qu’un report de deux ans de l’âge d’ouverture des droits (soit 64 ans) générerait entre 0,4 % et 0,9 % du PIB d’ici 2042, soit entre 10 et 20 md€. Ce montant correspond environ au tiers du besoin de financement annuel moyen d’ici 2047 estimé”.
3. Une hausse des cotisations patronales de retraites
“Une hausse de l’ordre de 1 point des cotisations patronales retraites les augmenterait de quelque 7,5 milliards, soit environ 15 % du besoin de financement annuel moyen calculé d’ici 2047. Une telle hausse requerrait de faire passer le taux des cotisations retraite employeurs à 17,5 % du salaire brut, contre 16,5 % actuellement. Il est à noter que les taux de cotisation français de droit commun portent déjà notre niveau de prélèvement sur les rémunérations des actifs au maximum européen aujourd’hui constate”.
4. Augmenter le taux d’emploi
“La hausse du nombre d’actifs augmente mécaniquement la somme des cotisations de retraite, puisque les cotisations de retraite sont en proportion des salaires versés…./… Si notre pays approchait du plein emploi, (un million et demi d’emplois supplémentaires), cela produirait quelque 10 Md€ de cotisations supplémentaires, soit de l’ordre de 20 % du besoin de financement annuel moyen d’ici 2047.”
5. Améliorer la productivité
“Pour obtenir les ressources nécessaires pour couvrir une autre part du besoin de financement annuel moyen (de l’ordre de 0,2 % du PIB), l’objectif devrait être de passer à un taux annuel moyen de gain de productivité de 1,3 % par an. Cette ambition n’est pas inatteignable mais requiert de mettre en œuvre les leviers mis en avant par le Conseil national de la productivité.”
Quelle que soit l’issue du débat sur la modification des dispositions relatives aux retraites, deux choses sont certaines : l’âge de la retraite sera retardé et le montant de la retraite sera inférieur au niveau actuel
(Ne serait-ce parce qu’en repoussant l’âge légal on réduit le nombre de retraités susceptibles de toucher une retraite complète) sauf pour ceux qui perçoivent les minimas de retraite (une retraite plancher devrait être fixée).
Pour pouvoir partir avant l’âge permettant d’obtenir une retraite à taux plein (65 ans au lieu de 62 ans) et bénéficier d’un complément de retraite capable de combler une diminution de sa retraite, il faudra faire des efforts d’épargne supérieurs à ceux que l’on fait aujourd’hui.
La nécessité d’ouvrir un ou plusieurs plans d’épargne retraite individuels (PER) se fera plus lourdement sentir.
Verser des montants réguliers et significatifs d’épargne deviendra, sinon une obligation, du moins, une règle de vie.