Crédit in fine et assurance-vie : soyez prudent !
Nous sommes entre le second semestre 2001 et le premier semestre 2002, un cabinet de conseillers indépendants (qui a pignon sur rue) conseille à des clients un prêt in fine d’une durée de 120 mois (10 ans) pour financer une opération immobilière.
La totalité de l’argent du client est investie dans un contrat d’assurance-vie en unités de compte. Pendant la durée du prêt, le client ne rembourse que les intérêts, puisque le principe du prêt in fine est de rembourser la totalité du capital emprunté à l’échéance des 10 ans grâce à l’argent placé sur le contrat d’assurance-vie et aux intérêts acquis sur ce contrat pendant les 10 ans.
Au départ, tout se passe bien, malheureusement la terrible année 2008 arrive avec des marchés financiers en très forte baisse et la crise dite des « subprimes » lors de laquelle certaines sociétés de gestion ont fait perdre des sommes colossales à leurs clients. Résultat : fin 2011 lorsque la banque exige le remboursement du prêt immobilier les clients n’ont plus assez d’argent, « Les revenus de ce contrat n’ayant pas permis de couvrir le coût du prêt ».
Les malheureux clients assignent en indemnisation la banque et le courtier. Les affaires se terminent par huit décisions de la Cour de cassation (1 ère Chambre civile, 8 arrêts du 16 janvier 2019, pourvois nos 17-21218 à 17-21225).
Et si on reparlait des frais de l’assurance-vie …
« Les frais d’acquisition correspondent aux frais engagés lors de la souscription des contrats d’assurance. Ils comprennent notamment les commissions d’acquisition versées aux apporteurs d’affaires, les frais des réseaux commerciaux, les frais d’ouverture de dossiers et la publicité. Les frais d’administration sont liés à la gestion des contrats en portefeuille. Il s’agit principalement en assurance-vie des frais d’encaissement des primes et de gestion de l’attribution de la participation aux bénéfices. La ventilation de ces frais dans la comptabilité analytique est hétérogène d’un organisme à l’autre. Par exemple, la ventilation des commissions versées aux réseaux apporteurs d’affaires peut être classée en frais d’acquisition comme ventilée entre administration et acquisition, selon qu’il est tenu compte de la prestation accomplie par le réseau.
Pour l’ensemble du secteur de l’assurance-vie, les frais d’acquisition représentent 4,7 % des primes en 2017. Ces frais sont plus faibles pour les bancassureurs (3,8 %) que pour les autres organismes vie (6 %). Les frais d’administration représentent quant à eux 0,4 % des provisions d’assurance-vie. »
Avec cette explication donnée par l’ACPR, on comprend pourquoi l’assurance-vie sur Internet est moins chère. (La rentabilité technique des organismes d’assurance-vie et mixtes établis en France » Analyses et synthèses ACPR n° 98 publié le 17 janvier 2019).
Suppression d’une UC
Cette décision de justice est l’occasion de rappeler que l’assureur peut modifier une unité de compte (UC) du contrat d’assurance-vie à charge pour lui d’en informer par écrit les adhérents trois mois au minimum avant la date prévue de son entrée en vigueur et à condition de proposer un support de remplacement aux caractéristiques équivalentes. En l’espèce un assureur mutualiste avait supprimé une unité de compte qui semblait donner satisfaction aux assurés depuis 8 ans sans offrir de solution de rechange. (Cour de cassation 2ème chambre civile, 4 octobre 2018, n° 17-22207).
Donner la richesse des fonds en euros …aux fonds eurocroissance
Les assureurs peuvent jusqu’au 31 décembre 2021 transférer les plus-values latentes des fonds euros au profit des fonds eurocroissance.
Un décret n° 2018-1303 du 28 décembre 2018 modifiant le décret n° 2016-959 du 13 juillet 2016 relatif aux transferts d’actifs vers des engagements donnant lieu à constitution d’une provision de diversification publié au JO du 29 décembre 2018 prolonge pour trois années le dispositif temporaire qui autorise chaque organisme d’assurance à procéder au transfert d’une quote-part des plus-values latentes des fonds « euros » vers les fonds « eurocroissance ».
L’assurance-vie reprend de belles couleurs
En 2018, la collecte nette de l’assurance-vie s’élève à 22,4 milliards d’euros, en très net progrès par rapport à 2017. Cette hausse est due, d’une part, à une augmentation de la collecte globale brute et, d’autre part, à une diminution des capitaux sortis de l’assurance-vie
Si l’on regarde de plus près les chiffres, on constate qu’en 2018 la collecte brute a été de 140,1 milliards d’euros alors qu’elle était en 2017 de 134,6 milliards d’euros.
Les prestations (retraits partiels, rachats totaux, capitaux remboursés aux bénéficiaires) se sont élevées en 2018 à 117,7 milliards d’euros et en 2017 à 126,3 milliards d’euros.
En résumé, 2018 a collecté plus que 2017 et en 2018 les assureurs ont versé moins de prestations aux assurés et aux bénéficiaires.
L’encours des contrats d’assurance-vie s’élève à 1 700 milliards d’euros à fin décembre 2018.
Pour Bernard Spitz, président de la FFA : « Avec 54 millions de contrats et 38 millions de bénéficiaires, l’assurance-vie reste le placement favori des Français. Face aux incertitudes de l’avenir, ce produit protège l’épargne en offrant les meilleures garanties de long terme, et remplit son rôle de financeur de l’économie. »
Pour percevoir le capital décès, le concubinage doit être prouvé
Mme Z décédée le 30 juin 2009, avait souscrit un contrat d’assurance décès auprès de la Macif. Le 17 juin 2011, son ex-concubin, M. X a assigné la Macif afin d’obtenir le paiement du capital décès prévu au contrat et les rentes éducation pour les enfants. « Le concubinage est une union de fait qui se caractérise par une vie commune stable et continue entre deux personnes » rappellent les juges, mais encore faut-il le prouver.
En l’absence de preuve du concubinage, le soi-disant « concubin » ne peut pas percevoir le capital décès.
Le versement du capital décès prévu au contrat souscrit par Mme Z impliquait que M. X établisse sa qualité de concubin au jour du décès.
Or les juges ont constaté que la preuve de la vie commune à cette date n’est rapportée ni par les factures d’électricité ni par la mention des noms de M. X et Mme Z sur le bail locatif de 1996, ni sur les avis d’échéances postérieurs.
Par ailleurs, les avis d’imposition de M. X. font apparaître une « Mme X, qui, n’ayant ni le même numéro fiscal ni la même date de naissance, ne peut être Mme Z.
En l’état de ces constatations et énonciations, c’est dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation des pièces soumises à son examen et hors toute dénaturation que la cour d’appel a estimé que celui-ci ne rapportait pas la preuve d’une vie commune avec Mme Z au jour du décès. Les magistrats suprêmes ont confirmé cette décision (Cour de cassation, 1 ère chambre civile, 3 octobre 2018, pourvoi n° 17-13113).